19/06/2015
ICEDA*, ces 5 lettres sans doute mystérieuses pour la plupart des habitants de l'agglomération lyonnaise, cachent en fait le nom d'une future poubelle atomique mais aussi la future plaque tournante du trafic des déchets nucléaires sur la commune de St Vulbas (située à 30 km du centre de Lyon et à peine 60 km à vol d'oiseau de Genève). Elle doit accueillir sur la commune de St Vulbas les déchets les plus radioactifs du démantèlement des réacteurs nucléaires comme la cuve de Brennilis dont le débit de dose est estimé en centaine de Sievert par heure. Une dose reçue de 6 Sieverts entraîne la mort.
Ce site doit reconditionner tous les déchets qui vont lui parvenir des 20 centrales nucléaires, c'est-à-dire les cisailler, les compresser et sans doute également les déclasser afin de rendre moins coûteux le stockage à long terme. Ces opérations vont générer des rejets gazeux comme le tritium (hydrogène radioactif) jusqu'à 8 fois supérieurs à ceux de la centrale du Bugey. Et les riverains devront supporter le ballet incessant d'au moins 10 convois par mois pendant au moins 50 ans avec le risque d'accident, d'irradiation et de contamination que comporte tout transport de matières radioactives. (…)
Alors peu importe, EDF attaque devant le Conseil d'Etat, le jugement initial d'annulation du premier permis de construire confirmé par 2 fois par le tribunal de Lyon et obtient gain de cause en mars 2014. Le Conseil d'Etat interprète de façon surréaliste "sont interdites toutes les occupations et utilisations non liées et nécessaire à l'activité de la centrale" du PLU de St Vulbas par "n'imposant pas que ces travaux aient pour objet exclusif de répondre à ses besoins". En clair, le Conseil d'Etat transforme l'interdiction en autorisation totale sous prétexte qu'elle va accueillir un peu les déchets de la centrale du Bugey, elle pourra accueillir donc tous les autres. Tordu, non ? Surtout quand on sait que la rédaction en 2008 de cette interdiction spécifiée dans ce PLU y a été mise pour justement ne pas accueillir les déchets d'ailleurs. Le tribunal de Lyon est contraint de se déjuger et de suivre celui du Conseil d'Etat. Aurions-nous ici la confirmation de «l'Etat nucléaire» comme l'écrit Corinne Lepage dans son dernier livre ?
La construction de l'ICEDA du Bugey va reprendre, en ayant piétiné toute tentative d'ouverture de débat sur la question du démantèlement des installations nucléaires.
Certes, une plainte est en cours devant la commission européenne déposée par les associations en août 2013 pour absence de désignation de l'autorité environnementale, autre entorse que s'est permis le Conseil d'Etat dans son jugement très alambiqué du 1er mars 2013 pour rejeter les argumentations des associations.
La convention d'Aarhus et la directive européenne 85/337 définissent expressément dans leurs annexes que pour les démantèlements et les stockages de déchets nucléaires, la participation du public doit être faite le plus en amont possible du projet quand toutes les options sont possibles.
Depuis l'annulation en juin 2007 du décret de démantèlement complet de la centrale nucléaire de Brennilis pour défaut d'information du public et absence d'enquête publique , les associations soutenues par des milliers de citoyens n'ont eu de cesse de réclamer l'ouverture du débat sur la question du démantèlement (courriers aux ministres, procédures juridiques, pétitions, communiqués etc...) alors que volontairement les projets sont morcellés pour empêcher une vision globale du dispositif Démantèlement, Déchets, Transports qui nous concerne tous.
Le nucléaire a été imposé sans aucun débat démocratique, refusons d'être spoliés de nos droits et exigeons que les textes européens soient respectés : le démantèlement est un problème d'intérêt général qui met en jeu la santé des travailleurs et de la population sans compter les milliards d'euros en jeu dans ce dossier. La moins mauvaise option doit être décidée par les Français de façon démocratique. Et celle de la future plaque tournante ICEDA avec des convois venus de toute la France est la pire des options.