Le public dispose d'un droit d'accès à une décision d'urbanisme portant sur l'implantation d'une installation relevant de la directive IPPC. Telle est la conclusion de la CJUE interprétant cette directive au regard de la convention d'Aarhus.
La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a rendu le 15 janvier 2013 un arrêt portant sur l'interprétation de la directive relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (directive IPPC) à la lumière de la convention d'Aarhus, en matière d'information et de participation du public au processus décisionnel. La décision a été rendue sur renvoi préjudiciel d'une juridiction slovaque dans le cadre d'un contentieux portant sur l'implantation d'une décharge.
Droit d'accès à la décision d'urbanisme dès le début de la procédure d'autorisation
L'une des questions portait sur le fait de savoir si les habitants étaient en droit de demander la publication de la décision d'urbanisme relative à l'implantation de la décharge. La Cour répond par l'affirmative, la directive IPPC imposant, selon elle, que "le public concerné ait accès à une décision d'urbanisme (…) dès le début de la procédure d'autorisation de l'installation".
Pour aboutir à cette conclusion, la juridiction communautaire a constaté que la décharge en cause entrait dans le champ d'application de la directive IPPC. Or, ce texte prévoit la participation du public concerné au processus de délivrance d'une autorisation pour de nouvelles installations. Ces règles doivent être interprétées à la lumière de la convention d'Aarhus, qui précise que le public concerné doit pouvoir consulter toutes les informations présentant un intérêt pour un processus décisionnel relatif à l'autorisation des activités visées dans son annexe I, dont fait partie la décharge litigieuse.
Dès lors, le public concerné par la procédure d'autorisation prévue par la directive IPPC doit avoir accès à tous les renseignements pertinents. La Cour constate ensuite que la décision d'urbanisme sur l'implantation de la décharge en cause constitue l'une des mesures sur la base desquelles a été prise la décision finale d'autoriser ou non cette installation. Et que cette décision comprend en outre des informations sur les incidences du projet sur l'environnement, sur les conditions imposées à l'exploitant pour limiter ces incidences, sur les objections élevées par les parties à la procédure d'urbanisme et sur les raisons qui ont motivé les choix effectués par l'autorité compétente pour délivrer cette décision. Il s'ensuit que "ladite décision d'urbanisme doit être considérée comme comportant des renseignements pertinents" auxquels le public concerné doit pouvoir accéder au cours de la procédure d'autorisation de l'installation.
La protection du secret commercial ne pouvait être invoquée
En second lieu, la CJUE indique que la directive IPPC ne permet pas aux autorités nationales compétentes de refuser au public concerné l'accès à une telle décision en se fondant sur la protection de la confidentialité des informations commerciales ou industrielles prévue par le droit national ou communautaire.
La Cour estime en effet que la confidentialité ne peut être invoquée dans le cas où une autorité publique autorise, au regard des règles d'urbanisme applicables, l'implantation d'une installation qui entre dans le champ d'application de la directive IPPC. Et à supposer même que, de manière exceptionnelle, certains éléments figurant dans les motifs d'une telle décision puisse comporter des informations confidentielles, les juges soulignent qu'en l'espèce la confidentialité a été utilisée pour refuser au public concerné tout accès, même partiel, à la décision d'urbanisme.
Droit à demander la suspension de l'autorisation contestée
Poursuivant l'interprétation de la directive IPPC, la Cour considère qu'elle donne le droit au public concerné de demander l'adoption de mesures provisoires de nature à suspendre temporairement l'autorisation contestée, dans l'attente de la décision définitive portant sur la légalité de cette décision.
Enfin, l'arrêt précise que la décision d'un juge national qui annule une autorisation accordée en violation des dispositions de la directive IPPC "n'est pas susceptible en tant que telle, de constituer une atteinte injustifiée au droit de propriété de l'exploitant".