L’article L 120-1 du Code de l’Environnement http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000022496684&cidTexte=LEGITEXT000006074220 avait été déclaré contraire à la Constitution par une décision du Conseil Constitutionnel du 23 novembre 2012 avec effet au 1er septembre 2013. Les parlementaires viennent de combler cette lacune en adoptant à l’Assemblée Nationale un projet de loi le 13 décembre dernier selon la procédure accélérée. http://www.senat.fr/leg/pjl12-007.html
Les modifications touchent plusieurs articles mais l’essentiel se trouve dans une nouvelle rédaction de l’article L 120-1. Ces modifications et précisions visent « à garantir l’information et la participation du public aux décisions prises en matière d’environnement comme prévu par la Charte de l’environnement ».
Le Ministère de l’Ecologie rappelle que : « Le principe de participation du public constitue un des piliers de la démocratie, par la possibilité de faire entendre sa voix, d’une part, par la transparence qu’elle confère aux décisions des autorités publiques, d’autre part. La participation active des citoyens aux processus décisionnels renforce ainsi les fondements de ces choix sur toute question relative à l’environnement et à ses répercussions sur le cadre de vie ou la santé ».
En effet, il faut rappeler que : « Sur le plan juridique, le principe de participation est notamment protégé par la « Convention d’Aarhus » (convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, ratifiée par la France le 8 juillet 2002) http://www.pyrenees-pireneus.com/Environnement/Droit-Reglementation/Environnement-Droit-convention-aarhus-discussion.php , et l’article 7 de la Charte de l’environnement, adoptée en 2004. http://www.pyrenees-pireneus.com/Environnement/Droit-Reglementation/ENVIR-Droit-charte-environnement.html Selon cette disposition, toute personne a droit non seulement « d’accéder aux informations relatives à l’environnement » mais aussi « de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ». »
Voilà donc qui va compliquer la tâche à de nombreux détenteurs de la vérité et de la pensée unique telle que l’introduction d’ours dans les Pyrénées, que ce soit en France ou en Espagne mais aussi à quelques projets étonnants comme l’extension de la station de Cauterets en liaison avec Luz-Ardien.
Qu’est-ce qui va changer ?
Désormais, et selon ce nouveau texte :
- pour les décisions relevant de l’Etat, le public est informé par voie électronique, et sur demande, sur support papier consulté dans les préfectures et sous-préfecture. Dans un premier temps, le projet environnemental accompagné d’une note de présentation est mis en ligne. Le public peut ensuite y faire ses observations par voie postale ou électronique. Enfin, ces observations sont rendues publiques et l’administration devra en tenir compte.
- pour les décisions individuelles, prises par exemple par les collectivités, le projet de loi habilite le gouvernement à prendre par ordonnance les modalités de participation du public.
L’article L. 120-1 ainsi modifié prévoit désormais que "la participation du public permet d’associer toute personne, de façon transparente et utile, à la préparation des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement, en l’informant des projets de décisions concernées afin qu’elle puisse formuler ses observations, qui sont prises en considération par l’autorité compétente".
Quant aux délais pour formaliser les observations, un autre amendement présenté par le Gouvernement prévoit que les observations du public, formulées par voie électronique ou postale, doivent parvenir à l’autorité administrative concernée dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours. Il s’agit de "fixer un délai unique pour que le public formule ses observations quelle que soit la voie utilisée pour les transmettre à l’autorité administrative à l’origine de la consultation". Ce délai minimal est porté à 21 jours lorsque la consultation concerne un projet de décret ou d’arrêté ministériel.
Il est également noté que : « Au plus tard à la date de la publication de la décision et pendant une durée minimale de trois mois, l’autorité administrative qui a pris la décision rend publique, par voie électronique, une synthèse des observations du public ». Point nouveau qui n’a jamais été appliqué pour la consultation de 2011 concernant l’introduction d’ours en Béarn.
Dans un objectif d’efficacité de l’action administrative, un autre amendement prévoit de laisser à l’autorité administrative la possibilité de mener les consultations des commissions spécialisées en parallèle à la consultation du public, voire avant celle-ci. A défaut, les procédures "seraient mécaniquement allongées", justifie le Gouvernement.
Le Gouvernement a par ailleurs fait supprimer l’obligation d’adresser à l’ensemble des conseils municipaux concernés le projet de décision et sa note non technique, obligation jugée "disproportionnée" par rapport à l’objectif recherché.
Du nouveau pour les opposants à la déchèterie des coteaux et d‘ailleurs…
Un amendement présenté par Hélène Lipietz et plusieurs de ses collègues du groupe écologiste vise à rendre publiques toutes les études et analyses mises à la charge des exploitants d’installations classées et portées à la connaissance de l’Administration. "Les populations habitants ou souhaitant habiter à proximité d’activités telles que les déchetteries, les décharges, les lieux de rejets ou de déversements, des industries bruyantes ou dégageant des nuisances olfactives ou présentant des dangers potentiels sur la santé doivent avoir accès aux informations concernant ces activités", précisent les auteurs de l’amendement.
"Cette disposition constitue d’abord une confirmation d’une règle déjà en vigueur car inscrite en droit de l’Union européenne et déjà appliquée par la CADA. Toutefois, tous les exploitants ne sont pas encore informés de ce droit à l’information environnementale qui s’exerce sur leur activité", relève Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit de l’environnement au cabinet Lepage et ancien porte-parole de France Nature Environnement.
D’autres dispositions concernent les terres agricoles et la protection des bassins versant et aires de captage. Le risque de gel de certains terrains à toute activité n’est pas à exclure avec des conséquences économiques et sociales non négligeables qui pourraient se rajouter à l’application de la directive « Nitrate » et aux trames vertes et bleues à venir.
Si l’information du public est une bonne chose, la lourdeur des procédures risquent d’allonger les délais de réalisation des projets des collectivités locales ainsi que le coût des investissements. Pour les entreprises privées, le risque de délocalisation vers des pays moins regardant n’est pas à exclure avec les conséquences que ceci peut avoir sur les emplois. Un bien peut cacher un mal. Mais dans l’immédiat, nous pouvons penser que plusieurs projets pyrénéens seront affectés, qu’il s’agisse de l’extension de Piau-Engaly si tant est qu’il soit encore d’actualité, la remontée lourde de Luz-Ardien, le projet d’extension de la station de Cauterets et la liaison avec Luz-Ardiden, l’introduction d’ours pour laquelle une consultation a déjà eu lieu, une éventuelle et hypothétique TCP devenue une arlésienne, etc… sans parler de projets d’installations hydroélectriques déjà compromises par les trames bleues. Par contre la procédure d’introduction de bouquetins n’est pas remise en cause puisqu’engager avant le 1 janvier 2013.
Louis Dollo